L'Aveyron d'Amans-Alexis Monteil
 
Amans-Alexis Monteil (1769-1850), un historien français natif de Rodez,  fit paraître en 1802 (An X de la République) sa fameuse "Description du département de l'Aveiron" en deux volumes. On y retrouve, comme il le précise lui-même dans la préface, les anciens usages, les vieilles moeurs et les antiques opinions que le torrent des siècles a entraînés et dont il a laissé les débris dans le fond de nos départements. 

Le tour de l'Aveyron fait par cet historien est sans complaisance pour certains villages et leurs habitants à cette époque-là. On l'avait d'ailleurs aimablement prévenu qu'il serait dangereux pour lui de voyager dans nos montagnes du côté de Sainte-Geneviève (dont son père Jean-Baptiste était pourtant originaire). 

Après s'être longtemps interrogé sur cette haine, qui entre-temps "était passée à la seconde génération", il en découvrit la raison en lisant, quarante années plus tard, l'un de ses écrits qui disait à propos de cette région: "Les neiges et les glaces défendent l'entrée du pays aux hommes de loi". 

Fort heureusement pour lui, après la parution de sa "Description du département de l'Aveiron", il coula des jours tranquilles à Passy car, suite à ses écrits, il aurait pu rencontrer de gros problèmes s'il était revenu à Laguiole, Cassagnes-Bégonhès ou Aubin. Qu'on en juge (l'orthographe originale a été conservée): 

"Laguiole. Le territoire de La Guiole est assez productif en seigle dont on échange le superflu contre les vins du Lot (.. . ), les habitans sont d'ailleurs francs, bons et même pacifiques quand le vin est cher. 

Mais lorsque la récolte est abondante dans les vallons du département, la police a beaucoup de peine: les querelles y sont fréquentes, et d'autant plus dangereuses que presque tout le monde y porte un petit poignard appelé dans le pays capuchadou. Cette arme n'est autre chose qu'un couteau à lame fixe et dont le manche est très court: on la tient ordinairement dans la manche ou dans une poche longue de la culotte, et l'on s'en sert habituellement pour couper le bois ou le pain. 

Cassagnes-Bégonhès. L'intérieur de Cassagnes est obscur et malpropre. Nul commerce, nulle activité. On y redoute le travail, et on n'y craint pas la misère. 

Aubin. Si Aubin avait été connu dans les temps mythologiques, la théogonie n'aurait pas manqué d'y placer le séjour favori de Bacchus et de Silène. Il est rare de trouver d'aussi grands buveurs que ceux de ce canton: plusieurs d'entre eux ne connaissent d'autre boisson que le vin, et il leur serait impossible d'affirmer que l'eau n'est pas salée ou sucrée. II y a un demi-siècle qu'on écrivait et que l'on prononçait Albin au lieu d'Aubin. Les antiquaires ont cherché l'étymologie d'Albin, dans le nom d'un Romain appelé Albinus, son prétendu fondateur; ils l'auraient plutôt trouvée dans les deux mots de l'idiome du pays, que les habitans ont le plus souvent à la bouche, al vin, au vin. 

Deux siècles plus tard, ces textes de Monteil font sourire. Le capuchadou a été remplacé par un beau laguiole de corne et d'acier et l'activité des gendarmes des hauts plateaux de l'Aubrac n'a rien à voir avec la récolte de vin de Marcillac ou d'Entraygues. Cassagnes-Bégonhès est un village propre, fleuri, pimpant et dynamique. Quant à Aubin, on y connaît parfaitement le goût de l'eau et c'est d'ailleurs ici que fut réalisée la première piscine publique du bassin houiller (terme de l'époque). 

Amans-Alexis Monteil est également l'auteur d'une "Histoire des Français des divers états, ou Histoire de France aux cinq derniers siècles" en 5 volumes et d'une "Histoire financière de la France depuis les premiers temps de la monarchie jusqu'à nos jours". La "Description" et ces deux derniers ouvrages sont disponibles à la bibliothèque électronique Gallica. Monteil pensait que ses prédécesseurs avaient accordé trop d'importance aux princes et à leur ministres. Aussi entreprit-il de décrire méthodiquement les différentes classes sociales et leurs occupations à travers les siècles en s'appuyant sur une collection de manuscrits qu'il avait rassemblés. Il est probablement le premier historien européen à avoir mis l'accent sur les faits de civilisation. 

D'après le Guide 2005 des Vacances en Aveyron et d'autres sources


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