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La préfecture autonome tibétaine
du Gannan couvre une superficie de 45000 kilomètres carrés,
ce qui représente 10% de la superficie de la province du Gansu dont
elle fait partie; elle est située au sud de cette province de l'ouest
de la Chine; elle est bornée à l'est et à l'ouest
par de hautes montagnes, confine au sud à la région tibétaine
Aba du Sichuan et touche au nord-ouest au Qinghai. Fondée en 1953,
la préfecture administre la ville de Hezuo, sa capitale, et sept
comtés, à savoir ceux de Xiahe, Luqu, Lintan, Maqu, Zhuoni,
Diebu et Zhouqu lesquels totalisent 111 points de peuplement. Sa population
s'élève à 678900 habitants, dont 50,76% sont Tibétains,
les autres se partageant entre 24 nationalités dont les principales
sont les Han, les Hui, les Mongols et les Mandchous; cette population se
concentre à l'est, dans la région agricole; elle est clairsemée
à l'ouest, dans la zone de pâturages; une grande partie des
habitants vivent dans les villes et les villages.
La situation de la préfecture en fait le lieu de passage obligé entre les plaines centrales de la Chine et le plateau tibétain, à proximité immédiate de la Route de la Soie. C'est une région montagneuse dont le point culminant, situé dans les montagnes Dieshan, au sud, s'élève à 4920 m; l'altitude de la vallée la plus basse ne descend pas en dessous de 1172 m et la hauteur moyenne du plateau central avoisine les 3000 m. Les principales rivières sont le Fleuve Jaune, la Taohe, la Daxia et le Dragon Blanc; ces rivières appartiennent au bassin du Fleuve Jaune (Taohe, Daxia) et au bassin du Yang Tsé Kiang (Dragon Blanc). La préfecture compte un assez grand nombre de lacs, mais la superficie de ceux-ci est plutôt réduite, si on la compare à celle de lacs d'autres régions; les principaux lacs sont: le Gahai au Luqu, le Yehai au Lintan, le Dalijia et le Darzong au Xiahe, le Guma au Diebu et les groupes de lacs du Maqu. Région de cultures, d'élevage et de forêts, dont on dit qu'on y rencontre les quatre saisons dans la même journée, la préfecture possède également quelques mines, notamment une mine d'uranium, exploitée depuis 1980 à Têwo, non sans dommages pour l'environnement, ainsi que des installations de production d'énergie électrique; les animaux sauvages y sont nombreux, citons notamment les gazelles du Tibet et de Mongolie, le léopard des neiges, les daims moucheté et musqué, les cygnes, les grues au cou noir, les coqs des neiges...; les pâtres nomades y observent avec soin les migrations des oiseaux comme autant d'augures propices ou menaçants; ils considèrent les grues comme des êtres surnaturels, symboles de chance et de beauté, aussi prennent-ils bien soin de ne pas les déranger et ne les tuent jamais. Les plantes sauvages et médicinales foisonnent sur les pentes (lotus des neiges; fritillaires; cordyceps sinensis, combinaison unique d'une chenille jaune et d'un champignon...). On y trouve plusieurs forêts de pierre et des canyons. Comparée parfois au "Shambala",
cet élysée de la mythologie tibétaine, une sorte de
paradis terrestre où les hommes vivent en paix et en harmonie avec
la nature, la préfecture autonome est appelée aussi le "Jardin
de Lanzhou"; à ces titres, elle attire de nombreux touristes;
ces derniers viennent non seulement pour jouir des attraits de la nature,
mais également pour admirer ses richesses culturelles exceptionnelles,
dont 137 monastères bouddhistes tibétains, où sont
constamment brûlées des branches de cyprès qui embaument
l'air. Certains monastères, comme celui de Labrang, bénéficient
d'une très grande notoriété. Peuplée de Tibétains
à hauteur d'un peu plus de 50%, la préfecture comporte, comme
on l'a déjà dit, de nombreuses autres ethnies avec leurs
propres traditions culturelles et vestimentaires. Rien que pour ce qui
concerne les Tibétains, le Gannan ne compte pas moins de 86 sortes
de costumes qui s'adaptent aux conditions climatiques et comportent une
version pour chaque saison: ceux d'hiver sont en cuir, ceux d'été
en coton ou en soie, ceux de demie saison en lainages fins. Généralement,
les habits masculins sont plutôt amples, avec de longues manches,
et ne descendent pas au-dessous du genou, alors que les vêtements
féminins s'ajustent au corps et descendent jusqu'aux chevilles.
La beauté des costumes, l'étrangeté
des cérémonies religieuses qui se déroulent dans la
préfecture autonome, tout au long de l'année, constituent
un enchantement magique pour les visiteurs de cette contrée mystérieuse
imprégnée des souvenirs légendaires du roi Gesar.
Située au nord du plateau du Gannan, au coeur d'une zone de cultures et de prairies, d'où serait originaire une race porcine, cette cité, capitale de la préfecture autonome, fut, sous les Tang, un important centre commercial et un lieu de rencontre entre la Chine et le Tibet alors à son apogée. Cette agglomération, qui se trouve sur une importante voie de communication nationale menant jusqu'à Pékin, est aujourd'hui une ville en plein essor qui se modernise et compte 80500 habitants répartis sur une superficie urbaine de 12 kilomètres carrés. Son altitude moyenne avoisine les 3000 m. Dans ses alentours, on peut visiter treize monastères bouddhistes tibétains, une cinquantaine de temples, une mosquée et plusieurs grottes. La Tour de Milarepa, qui s'élève au nord de la cité, est l'une des constructions les plus prestigieuses de l'Amdo; plusieurs autres centres d'intérêt existent à proximité de la ville: le point de vue sur les prairies de Dangzhou, où est organisé chaque année, par les autorités du comté, le festival Shambala du Gannan; la Montagne du Prince, une branche des Xiqing, qui tient son nom du passage du prince Fusu de la dynastie des Qin, un lieu sacré de l'Amdo; le point de vue sur la rivière Taohe et ses canyons, endroit renommé pour la grande variété d'oiseaux qui le hante; la Prairie Meiren, un paysage de steppe aux nombreux troupeaux et au folklore rustique apprécié etc... La Tour de Milarepa (Do Sékhar Guthog) est située dans le Tsö Gandèn Chökhor à Gencho Dzong. Il est interdit de photographier à l'intérieur. Le bâtiment contient de nombreux objets précieux (tankas, statues) et les murs sont peints à fresques. On compte plus de 1270 statues de diverses tailles; Milarepa y est représenté à l'infini sous forme de petites statues logées dans des niches; on le reconnaît à sa main portée au niveau de l'oreille, symbole de l'enseignement oral de l'école kagyupa. L'ensemble est arrangé de manière à donner au visiteur une vision aussi complète que possible du bouddhisme tibétain et de l'histoire religieuse du pays, le tout de façon pédagogique. On accède aux neuf étages supérieurs au moyen d'échelles de meunier rudimentaires pourvues de rampes, en bois ou en métal, comme dans toutes les constructions monastiques tibétaines. Au premier étage, on découvre la statue de Maitreya (Qamba), Bouddha du futur, au centre de deux compagnons: à gauche Manjusri, bodhisattva de la sagesse; à droite Vajrapani, puissant bodhisattva capable d'éloigner toutes les forces négatives. Au même étage se dressent les statues dorées de personnages importants de l'histoire religieuse du Tibet: Thangtong Gyalpo, moine kagyupa, architecte et fondateur de l'opéra tibétain, ainsi que les rois vertueux du pays: Songtsen Gampo et ses deux épouses, l'une chinoise (Wencheng) et l'autre népalaise (Chizun), qui introduisirent le bouddhisme au Tibet; Trisong Detsen qui propagea cette nouvelle religion, au détriment du Bön, monarque sous le règne duquel débuta réellement la vie monastique; Ralpachan qui fit traduire, avec le plus grand soin, de nombreux textes sacrés. Au second étage, la statue de Tsongkapa, à l'origine de l'école gelugpa, est entourée de celles des Dalaï lamas et Panchen lamas. On y trouve aussi les représentations des cinq premiers hiérarques de l'école sakyapa ainsi que celle du fondateur du monastère de Labrang. Plus de 500 sûtras du Tanjur et du Kanjur, ouvrages canoniques tibétains, y sont également stockés. Au troisième étage, les principales statues sont celles de Padmasambhava, à l'origine de l'école nyingmapa, Shântarakshita, fondateurs du monastère de Samye, et Trisong Detsen qui appela ces deux maîtres hindous pour répandre le bouddhisme sur les hauts plateaux. Le quatrième étage est consacré aux 21 taras et aux arhats, les unes et les autres peints sur les murs; les deux principales taras, la blanche et la verte, sont supposées être les deux épouses de Songtsen Gampo; ces représentations féminines du bodhisattva de la compassion peuvent être rapprochées de la Kwan-Yin chinoise; quant aux arhats, ce sont des êtres presque parvenus à la perfection. La statue principale de cet étage est celle du maître de la tendance ésotérique; le bouddhisme tibétain se divise en deux tendances: la voie moyenne ou exotérique, diffusant publiquement la doctrine religieuse, et la voie ésotérique, liée à des pratiques plus ou moins magiques, qui se transmettent oralement, de maître à élève. Au milieu du cinquième étage, se tient Marpa le traducteur, un des prédécesseurs de l'école kagyupa. Il traduisit de nombreux textes sacrés apportés de l'Inde. Il est accompagné de son disciple Milarepa; des épisodes de la vie tumultueuse de ce dernier sont peints à fresque sur un mur. Né dans une famille aisée, Milarepa fut spolié par son oncle à la mort de son père; il se vengea en détruisant la famille de son persécuteur au moyen de ses pouvoirs surnaturels; saisi de remords, il devint ensuite le disciple de Marpa qui ne le ménagea pas; Marpa l'engagea notamment à construire une maison, dont la tour visitée est supposée être une réplique, se montrant insatisfait et la faisant démolir à plusieurs reprises, alors qu'elle était presque achevée; Milarepa devint ensuite ermite, se nourrissant, pendant de nombreuses années, presque exclusivement d'orties, afin d'atteindre le nirvâna en une seule vie; il enseigna le bouddhisme à ses disciples au moyen de poèmes et de chansons. Comme il portait une robe blanche, l'école kagyupa est parfois appelée la secte blanche. Au sixième étage, se trouve la
statue de Mahakala (Tantra-Yana Vajra), qui crée, défait
et contrôle le monde, considéré comme un des avatars
de Shiva, protecteur des Dalaï lamas et des monastères. Le
culte rendu à cette divinité augmente la puissance et la
chance de succès de ceux qui le pratiquent. Phagpa, un Sakyapa,
envoya à Koubilaï khan une statue de cette divinité,
qui entra ainsi dans le panthéon de la dynastie mongole.
Au huitième étage sont les statues des cinq Tathagatas ou dyanis-bouddhas; ces bouddhas de méditation ou de sagesse, sont un groupe de divinités qui, dans le bouddhisme tibétain, représentent les cinq aspects du Bouddha primordial et les cinq sagesses permettant de transformer les cinq émotions négatives en énergie positive. A leurs côtés se dressent les statues de Sakyamuni et de plusieurs autres bouddhas. Le neuvième étage est à peu près vide. Son plafond est décoré d'un mandala qui représente la place où Sakyamuni s'assied lorsqu'il enseigne la doctrine bouddhique. Les statues du troisième au huitième
étage sont sculptées dans du bois de santal ou de cyprès.
De nombreuses autres statues et objets précieux figurent dans les
autres bâtiments de ce vaste ensemble monastique.
Xiahe Le comté de Xiahe est situé au sud-ouest de la province du Gansu. Il occupe 6274 kilomètres carrés et comporte trois villes et treize villages. Quatorze nationalités s'y côtoient notamment les Han, les Hui, les Salar, les Dongxiang, les Mongols et les Tibétains; ces derniers représentent 78% d'une population de 77800 habitants. Il est bordé par Hezuo à l'est, Luqu au sud, la préfecture de Linxia et le Qinghai au nord (comtés de Xunhuan et de Tongren) ainsi qu'à l'ouest (comté de Zeku). Ce comté décline du nord-ouest au sud-est, à partir du bord du plateau du Qinghai-Tibet; l'altitude moyenne y est comprise entre 3000 et 3800 m avec un point culminant à 4636 m (Dalijia). C'est une terre d'élevage, de culture, de forêts et de tourisme avec quelques ressources minières et en eaux minérales; le tourisme y est devenu aujourd'hui la principale industrie. La proximité du Tibet et de la Route de la Soie en fit autrefois une importante marche frontière, comme l'attestent les vestiges de villes fortifiées, ainsi que le centre commercial, politique, culturel et religieux de l'Amdo qu'il est resté jusqu'à nos jours. Il est aussi historiquement le point de convergence des Tibétains du Qinghai, du Sichuan et du Gansu. Sa capitale est, après Lhasa, le second plus important centre de la civilisation tibétaine. Le monastère de Labrang, l'un des six plus importants de l'école gelugpa, s'élève au nord-ouest du comté. Fondé en 1709, par le moine E'ang Zonghe il constitue, avec ses six collèges, la plus grande université tibétaine du monde; on désigne parfois ce véritable musée de la culture tibétaine sous le nom du "Labyrinthe d'or", de "Louvre oriental" ou de "Vatican asiatique" et on le compare au château de Versailles. On y trouve 6 salles d'études, 48 temples dont 1 de 7 étages, 4 de 6 étages, 4 de 4 étages, 8 de 3 étages, 9 de 2 étages etc... ainsi que nombre de résidences et édifices variés. La superficie bâtie couvre environ un demi kilomètre carré. Le style des bâtiments est composite tibéto-han; leur structure combine le bois, la pierre et l'argile. On y trouve 262 statues de bouddhas de plus d'un mètre de haut (dont une de 12 m) et 29000 de moins d'un mètre, 60000 volumes de sutras, sans compter les décorations diverses et les objets rituels qui y foisonnent. Enfin, 108 autres monastères sont placés sous sa juridiction. Les principaux édifices sont le chorten doré Gongtang, édifié en 1805, détruit par les gardes rouges, lors de la révolution culturelle, et rétabli entre 1991 et 1993 à l'identique; le Pavillon du Bodhisattva Manjusri, édifié en 1814, également détruit, pendant la révolution culturelle, et reconstruit depuis, lequel contient de nombreuses statues et dont le toit de cuivre miroite sous le soleil; le monastère nyingmapa, datant de 1887, avec son opéra tibétain, près du village de Wangfu, faubourg de Jiujia, à l'ouest du monastère gelugpa; le couvent de nonnes gelugpa, vieux de plus d'un siècle, également dans le village de Wangfu; un couvent de nonnes nyingmapa existe aussi de l'autre côté du comté. Parmi les endroits intéressants à visiter, citons les pâturages de Sangke environnés de montagnes, au sud-ouest du comté; des courses de chevaux s'y livrent en mémoire d'une légende selon laquelle le roi Gesar y aurait remporté une épreuve de ce type; l'ancienne cité fortifiée de Sangke y couronnait autrefois une montagne; son mur d'enceinte mesurait plus de 2 km; cette cité aurait été construite, par la dynastie des Han, pour séparer le monde chinois des Qiang, peuplade qui vivait alors au nord du plateau tibétain. Les pâturages de Ganjia, quant à eux, sont renommés pour leur race de moutons particulièrement résistants que l'on ne rencontre que sur le plateau du Qinghai-Tibet; leur chair est tendre et les fortes fibres de leur laine soyeuse sont idéales pour la confection des tapis. Le premier maître Jamyang de Labrang naquit au Ganjia; il devint moine à l'âge de 13 ans et se rendit au Tibet central pour étudier à l'âge de 21 ans; il étudia pendant 40 ans et devint si instruit qu'on avait coutume de l'appeler le second Tsongkhapa; en 1709, pendant le règne de l'empereur mandchou Kangxi, le roi mongol du Kokonor, Ganden Erdene Junang, lui demanda de revenir en Amdo, où de nombreux Mongols vivaient parmi les Tibétains; il accepta et, après son retour, commença l'édification de Labrang; le Ganjia compte plusieurs monastères dont celui de Ganping, où réside un bouddha vivant féminin (Kungrhitsang), et celui de Zuohai qui serait le seul édifice religieux d'origine locale. Au pied de la montagne Dalijia la grotte Baishiya (falaise de la pierre blanche), cinquième d'un complexe de neuf grottes, creusée par l'érosion en une sorte de sanctuaire naturel, est un lieu de pèlerinage bouddhiste réputé où les concrétions stimulent l'imagination qui y retrouve les formes des divinités. L'ancienne ville de Bajiao, à 30 km de Xiahe, tenait son nom des huit sommets du svastika, croix tibétaine du bonheur perpétuel; elle aurait été construite sous les Han de l'ouest, voici plus de 2000 ans, selon un modèle rectangulaire rompant avec la tradition carrée de l'époque; elle s'élevait sur la pente d'une montagne, était fortifiée et entourée de murs; des portes permettaient d'y pénétrer à l'est, à l'ouest et au sud; deux faubourgs la complétaient à l'est et à l'ouest; des rues en zigzag gagnaient le coeur de la cité que des canaux parcouraient du sud au nord; cette ville fut un centre prospère d'échanges de produits agricoles et d'élevage. Également à une trentaine de kilomètres de Xiahe, le lac Darzong, dans la vallée du même nom, étend ses eaux de jade à 3000 m au dessus du niveau de la mer; des oiseaux aquatiques, des canards chinois et des canards jaunes y élisent domicile; les environs sont boisés de pins et de cyprès parmi lesquels vivent des faisans, des léopards ainsi que d'autres animaux sauvages; à proximité du lac se trouvent six fortes plates-formes rocheuses utilisées comme lieu du culte bouddhiste. Les cérémonies du Losar,
premier de l'an tibétain, et du Monlam sont célébrées
avec un faste particulier à Labrang. Le troisième jour de
la nouvelle année lunaire, les jeunes filles revêtent leurs
plus beaux atours et leurs cheveux sont finement nattés pour le
shangtou, c'est-à-dire l'annonce qu'elles sont parvenues
à l'âge adulte (17 ans). On profite aussi des troisième
et cinquième jours pour célébrer des mariages. Le
Monlam, ou Festival de la Grande Prière se déroule
du troisième jour au dix-septième jour du premier mois lunaire,
avec des points forts le huitième jour (libération des animaux
consacrés au Bouddha), le treizième jour (déploiement
du grand tanka), le quatorzième jour (danses
cham), le quinzième jour (exposition des statues de beurre)
et le seizième jour (procession de Maitreya).
Luqu Le comté de Luqu, à l'ouest de la préfecture, est bordé par le comté de Xiahe au nord, celui de Zhuoni à l'est, celui de Maqu au sud-ouest, le Henan (Qinghai) à l'ouest et le Nuoergai (Sichuan) au sud. Ce comté, bassin de la rivière Tahoe, est bien arrosé. Il couvre une superficie de 5208 kilomètres carrés dont 394000 hectares de prairies, 17133 hectares de forêts et 2740 hectares de terres labourées. L'ouest montagneux est une zone de pâturages verdoyants; l'est draine les eaux du bassin de la Taohe où les terres cultivées s'étendent au fond des vallées; l'altitude moyenne avoisine 3500 m. La population s'élève à 30000 habitants, des Tibétains et une dizaine d'autres minorités. Les principaux sites touristiques du comté sont la Forêt de Pierres de Zecha, le lac Gahai et le monastère de Langmu. La Forêt de Pierres de Zecha est une formation d'origine karstique où le visiteur se promène dans un dédale de rochers aux formes évocatrices; des événements historiques s'y sont déroulés: la dynastie des Tang et l'empire tibétain s'y sont rencontrés et les derniers Mongols y livrèrent bataille aux forces coalisées contre eux au 13ème siècle; un phénomène remarquable s'y observe: on y entend par endroit le son d'une cascade perdue parmi les rochers, mais ce son s'éteint lorsqu'un obstacle lui fait écran et qu'il cesse d'être réfléchi par une paroi; les bergers considèrent ce lieu comme une terre sacrée; on y pénètre dans une grotte relativement peu profonde mais assez dangereuse car son fond est privé d'oxygène, ce qui n'empêche nullement les pèlerins de venir y déposer des fleurs et autres offrandes; plusieurs légendes de la Forêt de Pierres se rattachent au mythe du roi Gesar: un lion de pierre l'y protégerait, il y aurait déployé son armée sur une plate-forme et, enfin, il y aurait triomphé d'un monstre qui terrorisait la contrée; le monstre vaincu se serait caché au fond d'un lac, mais Gesar, d'un coup d'épée, aurait ouvert les bords du lac libérant son eau; la brèche ainsi formée aurait donné naissance à une rivière et le monstre piteux se serait enfui à tout jamais; la végétation qui croît dans la Forêt de Pierres comporte des espèces qui ne se rencontrent qu'ici (azalée alpin, fleurs gesang* jaunes, sapins à cônes pourpres centenaires...). Le lac d'eau douce Gahai couvre une surface de 600 hectares à 3480 m d'altitude. Le monastère gelugpa de Langmu est un lieu de passage des pèlerins sur la voie principale du Gansu au Sichuan. *Bonheur en tibétain.
Maqu Le comté de Maqu, au sud-ouest de la préfecture, est entouré par le comté de Luqu et le comté de Ruoergai (Sichuan) à l'est, le comté d'Aba (Sichuan) au sud, les comtés de Jiuzhi, Gande, Maqin (Qinghai) à l'ouest et le comté autonome mongol du Henan (Qinghai) au nord. Il couvre une superficie de 10109 kilomètres carrés dont 89,4% sont occupés par des pâturages. Il compte huit bourgades et sa population s'élève à 40000 habitants à 88% tibétains. Il s'abaisse de l'ouest à l'est et du nord-ouest au sud-est. La chaîne montagneuse Xiqin, qui appartient aux Qinling, y pénètre au nord pour rencontrer les Animaqing, lesquelles font partie de la chaîne des Kunlun. L'altitude du comté est comprise entre 3300 et 4806 m en une suite compliquée de montagnes, de gorges, de rivières et de prairies au climat humide et froid; la température moyenne avoisine 1,1 ° et il n'y fait jamais chaud, même en été. C'est le territoire du royaume de Ling et du roi Gesar et de nombreuses légendes y célèbrent les hauts faits du héros mythique tibétain; là, après avoir essuyé bien des échecs, Gesar trouva le merveilleux cheval Chitu qui lui permit enfin de triompher. Maqu est le nom tibétain du Fleuve Jaune dont la première d'une succession de larges boucles semble prendre le comté à la taille. Dans les herbages, parmi les meilleurs d'Asie, vivait autrefois le rhinocéros à longs poils; on y trouve encore la race des chevaux hequ, les moutons ola, le yak awancang et le mastiff tibétain hequ qui sont élevés depuis plus de 3000 ans; plus de 660000 têtes de bétail s'y rencontrent. Parmi les sites d'intérêt, citons, le premier pont sur la première boucle du Fleuve Jaune, la source thermale Chaganmanqu (chagan: blanc en mongol, manqu: source thermale en tibétain) qui soigne les maux d'intestins et d'estomac ainsi que les problèmes de peau; cette source inspira au troisième Gongtangcang (1768-1821) de Labrang un texte célèbre: "L'eau et les trois adages". Plusieurs faits d'armes réels ou mythiques, du temps du roi Gesar ou des monarques tibétains, ont marqué la contrée; le mont Huoriguori y aurait été formé en entassant les crânes des envahisseurs tués par les preux du royaume de Ling. Au dessus de la montagne aux Sept Fées, fréquentée par les cygnes, les grues cendrées ou couronnées de rouge, planent les aigles tandis que les daims hantent les futaies de pins et de cyprès; en automne, la verdure des conifères se mêle au rouge des feuillages qui vont choir; en hiver, la neige recouvre les monts. Les Sept Fées sont à l'origine de plusieurs légendes; selon l'une d'elles, un monstre du Fleuve Jaune semait autrefois la désolation sur ses rives où il causait des inondations; les Sept Fées descendirent du ciel pour le chasser; depuis lors, les nomades vivent heureux et font brûler des branches de cyprès en mémoire de cet événement tous les ans, au 15ème jour du 6ème mois lunaire; selon une autre légende, les Sept Fées, attirées par la beauté du site, vinrent se baigner dans le fleuve et résolurent de le retenir en le barrant avec leur corps; cependant la plus jeune des fées finit par se lasser et les sept soeurs furent pétrifiées et changées en montagnes par les dieux courroucés d'apprendre qu'elles étaient descendues sur terre sans leur autorisation. Trois sortes de fleurs uniques ornent le Ximeiduohetang (pays des fleurs): à la mi juillet, les saiqin jaunes embaument l'air et tachent les chaussures des voyageurs; en août, c'est au tour des gesang bleus d'ouvrir leurs yeux au milieu des herbages tandis qu'octobre donne le jour aux maogen; on dit que la cour du roi Gesar séjourna en ces lieux, traversés plus tard par la voie qui menait de Chang'an (X'ian) à Lhasa; les cinq premiers Jamyang de Labrang y séjournèrent au cours de leur voyage vers la capitale tibétaine. Le lac Quher, profond de 15 m, qui mesure 8 km sur 600 m, étale à 4500 m d'altitude des eaux parfaitement limpides; c'est un lieu saint de la tribu Oula. Dans le comté de Maqu, les funérailles
célestes sont les plus courantes; chaque tribu dispose de son propre
lieu de cérémonie, situé généralement
à l'écart; le corps du défunt est découpé
sur une table de pierre, avant d'être donné à manger
aux vautours. La crémation est réservée aux bouddhas
vivants; le cadavre est placé dans un cercueil puis brûlé,
après que des prières aient été dites par les
moines; les cendres sont dispersées sur les montagnes et dans les
rivières; pour les personnages les plus éminents, elles sont
recueillies dans une urne placée dans un chorten ou dans un temple.
Les moines ordinaires et les nomades des tribus Oula ou Nima
sont jetés après leur mort dans les rivières ou les
lacs, pour y être dévorés par les poissons. L'enterrement,
mal considéré, est réservé aux personnes mortes
accidentellement ou de maladies ainsi qu'aux enfants prématurément
décédés.
Zhuoni Le comté de Zhuoni, au sud-est de la préfecture, est frontalier des comtés de Minxian et de Zangxian à l'est, des comtés de Weiyuan, Kangle et Hezheng au nord, de ceux de Diebu et de Ruoergai (Sichuan) au sud, de ceux de Hezuo, Xiahe, Luqu à l'ouest et de celui de Lintan en son sein. Trois villes et quatorze villages sont sous sa juridiction; il couvre une superficie de 5420 kilomètres carrés avec une population d'environ 100000 habitants, la majeure partie Tibétains, les autres ressortant d'une dizaine d'ethnies dont les Han, les Hui, les Tujia etc.; la capitale du comté, Liulin, s'élève sur la berge de la rivière Taohe. Le nom du comté découle de celui d'une variété de pin qui y croit; l'un de ces arbres, qui s'élevait à cet endroit, servit de pilier pour la construction du monastère de Chanding, en 1295. Le climat est continental, avec des saisons nettement différenciées; la température moyenne s'établit à 4,6°. Les ressources de ce comté sont importantes; on y trouve notamment la pierre à encre Tao, l'une des meilleures de Chine; il possède de nombreux vestiges archéologiques provenant des cultures majiayao, qijia et siwa*; l'histoire y a laissé également plusieurs traces avec le cimetière de la famille royale tibétaine des Cemolin, l'ancienne cité stratégique de Yangba, où les Tang avaient établi une colonie militaire, des restes de la Grande Muraille édifiée par les Ming, ainsi que, plus récemment, le souvenir d'un dirigeant local qui participa, au 19ème siècle, à la préparation de la révolution démocratique chinoise, et enfin celui du leader paysan, Xiebafo, chef d'une révolte du Gannan. *Ces cultures sont représentées au musée de Lanzhou. Parmi les sites intéressants de ce comté, il convient de signaler les nombreuses gorges bordées de falaises (Dayu, Yunjiang, Sangbu, Kache, Cheba, Lizhu, Tazha...), qui donnent les unes dans les autres, avec leurs chutes d'eau et autres curiosités naturelles (pierre triangulaire, coq d'or annonçant l'aurore); certaines jouèrent un rôle stratégique important, comme la Kache, où s'affrontèrent Chinois et Tibétains sous les Tang et les Song, et les troupes de Wei et de Shu, à l'époque des Trois Royaumes; une voie de communication y passait, la route Tao-Die, et l'ancienne cité de Yangba gardait l'entrée ouest de la gorge. L'Abreuvoir au Neuf Dragons est un endroit particulièrement spectaculaire. La source médicinale Qiangcha soigne les maladies de la peau, mais elle est si froide qu'il est nécessaire de préparer son corps à la recevoir en y trempant d'abord ses mains, puis en s'en aspergeant le visage, avant de la boire ou de s'y baigner. Le monastère de Chanding, à peu de distance de la capitale du comté, fut fondé en 1295 par Basiba, hiérarque de l'école des Sakyapas; ultérieurement, le monastère s'affilia à l'école gelugpa; soixante et onze monastères dépendent de lui ce qui en fait l'un des plus importants de l'Amdo; il joua un rôle politique et religieux important au cours des siècles. En 840, Geryixidaji fut envoyé comme
gouverneur et collecteur de taxes en Amdo par le monarque tibétain
de l'époque, Chirebajin. Plusieurs générations plus
tard, la région sous l'administration du gouverneur s'était
étendue vers l'est, dans la région du Zhuoni. En 1401,
Xiedi en devint le chef sous l'administration des Ming; en 1418, l'empereur
chinois conféra à Xiedi le titre de directeur et de général
héréditaire; ses descendants restèrent à la
tête de la région jusqu'en 1950; pendant plus de 500 ans,
ils administrèrent une vaste zone comprenant le Zhuoni, le Diebu
et des parties du Zhouqu, du Xigut (Tanchang) et du Lintan comportant une
population de plus de 100000 âmes; ces potentats locaux exercèrent
une influence considérable en matières politique, économique,
culturelle et militaire au Gansu, au Qinghai, au Tibet et dans les autres
régions alentour.
Lintan Le comté de Lintan, autrefois appelé Taozhou, se trouve à la source de la rivière Taohe. Il est bordé par les comtés de Kangle et de Weiyuan au nord-est, le comté de Minxian au sud-est et par celui de Zhuoni sur ses autres faces. Il couvre une superficie de 1558 kilomètres carrés pour une population de 148300 habitants à 77% d'origine han; ces descendants de l'armée du sud du Yang Tsé Kiang, qui immigrèrent ici sous les Ming, ont conservé leurs coutumes, leur langage, leur culture et leurs vêtements traditionnels. La région est montagneuse et son altitude moyenne varie de 2209 à 3926 m; la partie la plus élevée est au nord-ouest et la plus basse au sud-est. Le climat y est froid (température moyenne de 3,2°) et assez humide; on n'y compte pas plus de 84 jours exempts de froid. Des milliers de gens du Gannan, du Dingxi, du Linxia et du Tianshui se donnent rendez-vous au Lintan chaque année pour un concours de chant. En 1936, Zhu De (Tchou Te) y prononça un discours, dans un des temples de la ville, à l'occasion du passage de l'armée rouge, et il y fonda le premier gouvernement communiste de la région. Yeliguan (Gonglangnang) est la Suisse
du Gannan; on y rencontre de nombreux témoignages historiques, notamment
l'ancienne ville de Shuichi, la cité de Gongling, la forteresse
Shiguan, les châteaux Xincheng, Shixia, Hongjiazhuang, Shicheng,
Shimiao, et d'autres encore. La gorge de la rivière Yemu s'étend
sur une cinquantaine de kilomètres en deux parties séparées
par la ville de Yeliguan; La Gueule Ouverte du Tigre y est une curiosité
naturelle formée par deux rochers; plus loin, la cascade de La Source
Fortunée et de la Chute Véloce est supposée fournir
son énergie vitale au boa noir de la Montagne du Lotus qui vient
s'y doucher; l'animal démoniaque est ainsi capable de tenir tête
à Zhao Lingguan, le dieu de la montagne; en raison de sa pureté
et de sa douceur, l'eau de cette cascade est utilisée pour la confection
de vins et de vinaigres. Sur la falaise, à 1 km environ au sud-est
de la ville de Yeliguan, se trouve une curiosité naturelle dénommée
le bouddha dormant ou le général regardant le ciel, selon
l'humeur de l'observateur; d'une dimension d'environ 5 km, cette statue
sculptée par la nature est la seconde plus grande de tous les bouddhas
dormants découverts en Chine (la première est celle de Leshan).
Une légende est attachée au lac Yehai; reliquat de l'étendue
d'eau céleste grâce à laquelle Dayu contrôlait
les cours d'eau, ce lac apporterait chance et félicité; sous
les Ming, le général Chang Yuchun tint garnison avec son
armée sur ses bords pour maintenir la paix et la prospérité
parmi les habitants; ce militaire épousa une Tibétaine nommée
Dunzhu et, lorsqu'il mourut, promu au rang de divinité, il continua
à servir les gens de la région; ceux-ci, lorsqu'ils tombaient
dans le besoin, pouvaient demander de l'aide au général déifié,
à renfort d'encens et de prière et, le deuxième jour,
ils trouvaient de l'argent sur le bord du lac; un riche usurier, qui comptait
sur ce stratagème, pour exploiter encore davantage les malheureux
contraints de recourir à lui, eut vent des largesses du dieu; il
se déguisa en mendiant et vint solliciter sa générosité;
mais la supercherie fut découverte et l'individu peu scrupuleux
fut jeté dans le lac où il se noya; depuis ce temps, pour
commémorer l'événement et rendre grâce à
la divinité, chaque année, au 28ème jour du 5ème
mois lunaire, toutes les ethnies de la région se réunissent
et célèbrent une fête grandiose, avec des chants, des
courses de chevaux et la combustion d'une grande quantité de plantes
aromatiques. La Montagne du Lotus, dont la forme évoque une fleur
de cette plante pourvue de neuf pétales, est un lieu saint du bouddhisme
et du taoïsme qui culmine à 3578 m, avec un dénivelé
de 1300 m de la base au sommet; elle fait partie de la chaîne des
Xiqing et ses falaises sont vertigineuses sur quatre de ses faces; de nombreuses
fables et légendes entourent cette éminence où se
rencontrent plusieurs sites d'intérêt. La Traction du Jeu
de Guerre rappelle la tradition militaire du comté; ce jeu est né
à l'époque des Ming, lorsque les soldats du général
Mu Ying se défiaient à qui serait le plus fort en tirant
sur une corde; la fête se célèbre du 14ème au
16ème jour du premier mois lunaire, à raison de trois rondes
par nuit, c'est-à-dire neuf rondes en tout; les jeunes, les vieux,
les hommes et les femmes... y participent, à l'époque
du Festival des Lanternes; le spectacle est si remarquable qu'il a été
inscrit en 2001 au Livre Guinness Mondial des Records. Parmi les autres
attractions du comté, il convient enfin de citer Les Pierres Rouges
et la Gorge Retirée.
Diebu Le comté de Diebu, au sud du Gannan, assure la jonction entre les provinces du Gansu et du Sichuan. Il est bordé par les comtés de Zhouqu et de Tanchang à l'est, les comtés de Zhuoni et de Minxian au nord, les comtés de Ruoergai et Jiuzhaigou (Sichuan) au sud-ouest. Les montagnes Qinling de l'ouest, Minshan et Dieshan le traversent, créant une pente descendante du nord-ouest au sud-est. L'altitude varie de 1600 à 4920 m; la zone est constituée d'une alternance de sommets et de vallées propice à un écho-système verdoyant, dans un climat qui ne connaît ni froid excessif ni fortes chaleurs; le comté bénéficie d'une température moyenne de 6,7° et de 147 jours exempts de froid. Il couvre une superficie de 4826 kilomètres carrés, administre douze bourgades avec une population de 56300 habitants dont 70,5% de Tibétains; parmi les autres nationalités, citons les Han, les Hui, les Mongols, les Man, les Miao et les Zhuang. Le comté est convenablement arrosé; le fleuve du Dragon Blanc le traverse sur plus de 100 km d'ouest en est et plusieurs de ses affluents le parcourent; des barrages hydro-électriques ont domestiqué leur énergie. Les ressources forestières sont abondantes, viennent ensuite les pâturages et enfin les terres labourables qui sont loin d'être négligeables; plus de 140 sortes d'arbres et d'arbustes y prospèrent et, dans leurs taillis, vivent plus de vingt espèces d'animaux protégés dont le panda géant, le léopard des neiges, l'antilope, le daim tacheté... On y trouve des matières premières nécessaires à la fabrication de produits médicaux d'une grande valeur (andouillers pileux, musc, vésicule biliaire d'ours...) ainsi qu'une grande variété de champignons. Le comté compte plusieurs sites liés aux événements révolutionnaires contemporains, en particulier ceux qui eurent lieu pendant l'offensive des troupes communistes pour briser l'encerclement du Kuomintang. En septembre 1935, dans le village de Gaoji à Dala, la conférence élargie du Bureau Politique du Parti Communiste décida d'entreprendre la marche vers le nord; cette décision est considérée comme une étape importante de la révolution armée; Mao Tsé Toung résidait au village de Cirina, à Wangzang, pendant cette période difficile. Les 14, 15 et 16 septembre 1935 de durs combats furent livrés par les troupes de l'armée populaire aux nationalistes qui fermaient la passe de Lazikou, dans les montagnes Dieshan; après plusieurs assauts infructueux, l'armée rouge finit par percer les défenses ennemies et par s'emparer de la passe ouvrant le chemin vers le nord du Shaanxi et mettant ainsi fin à une situation qui aurait pu lui être fatale; Mao Tsé Toung et Chou en Lai participèrent activement à l'action; un monument perpétue le souvenir de ce fait d'armes. Parmi les sites d'intérêt du comté,
citons le Parc forestier de Lazikou; le quartier général
de l'armée rouge et la résidence de Mao à Ejie; les
restes de l'ancienne cité Mamu de Tuguhun, datant des Zhou du nord,
qui fut rebaptisée Diezhou sous l'empereur Wudi des Tang, d'intéressants
témoignages archéologiques y ont été découverts;
la Montagne Tête de Tigre (Mamo en tibétain, c'est-à-dire
Montagne de Beauté) qui serait le corps pétrifié d'une
jeune fille; plusieurs grottes masquées par des cascades; la Gorge
de Dala ancienne voie de passage commercial, notamment de l'opium, entre
le Yunnan, le Guizhou, le Sichuan et le Tibet, où l'on trouve de
nombreux vestiges historiques d'époques reculées (châteaux
forts et monastères bön) mais aussi des ponts de bois construits
par les soldats de l'armée rouge, lors de la Longue Marche; la Réserve
Duoer et Axia où, dans les forêts de bambous, et autres espèces
d'arbres locaux, vivent des animaux sauvages, comme les pandas géants;
le monastère de Baigu, le seul à être demeuré
fidèle à l'école sakyapa, qui fut fermé en
1958, rouvrit en 1981 et compte aujourd'hui environ 80 moines; le monastère
bön de Zhari, dans la Gorge de Jianni, qui abrite maintenant une cinquantaine
de moines, dédié autrefois au culte du dieu local Tainianlaze,
deux saints hommes vinrent y prier et chasser de la région, grâce
à leurs pouvoirs magiques, les tigres et les léopards qui
sortaient fréquemment de la forêt pour attaquer les humains.
Zhouqu Zhouqu signifie "Rivière du Dragon" en tibétain. Le nom du comté provient du fait que la Rivière du Dragon Blanc le traverse; il est situé à la naissance de cette rivière, au sud-est de la préfecture. Il touche le Wudu à l'est, le Diebu à l'ouest, le Wexian et le Jiuzhaigou (Sichuan) au sud et le Tanchang au nord. Il couvre une superficie de 2984 kilomètres carrés et comporte vingt-deux bourgades avec une populations de 134700 habitants parmi lesquels les Tibétains représentent un peu moins de 32%. Le comté se situe dans la zone montagneuse Longnan qui appartient aux Qinling; les Qinling de l'ouest et les Minshan le coupent du nord-ouest au sud-est et la chaîne des Minshan y rencontre celle des Dieshan en y créant un relief tourmenté comportant de nombreuses gorges; l'altitude varie de 1173 à 4505 m; plusieurs sommets dépassent les 4000 m, dont le Leigu, le Sanshengye, le Qinshan, le Yangbu... La neige persiste sur le Leigu jusqu'au mois de juin. Le Zhouqu appartient à une zone tempérée chaude et humide; il ne fait ni trop froid en hiver, ni très chaud en été; le climat change néanmoins d'un endroit à l'autre, suivant l'exposition; on se trouve ici dans le bassin du Yang Tsé Kiang et de ses affluents et la température moyenne s'établit à 12,9° avec un haut de 23° en juillet et un bas de 1,7° en janvier; les précipitations sont abondantes, la neige ne tombe pas plus de sept jours par an et la période exempte de froid dure 223 jours. Outre la Rivière du Dragon Blanc, le comté est également parcouru par la Rivière Gongba, qui se jette dans le Dragon Blanc, et la Rivière Boyu, qui se jette dans la Baishui. Le Zhouqu possède maints sites d'intérêt. Dans le Parc de la Forêt et de la Plage sont préservées de nombreuses espèces de plantes, de fleurs et de fruits. Le Lac de la Vie occupe un ancien volcan, sur une superficie d'environ 3200 mètres carrés; parfois des vapeurs chaudes s'élèvent de son eau; il doit son nom à une légende: voici longtemps, un chasseur se dirigeait vers ce lac, en compagnie de son chien, lorsqu'il aperçut un daim musqué; il poursuivit le daim, mais, au moment où il allait le tirer, celui-ci disparut dans le lac, d'où s'éleva une colonne de fumée; le chasseur s'effraya, un souffle violent l'emporta dans les eaux; le chien s'en revint en aboyant à la maison; alertés par les abois du chien, les parents du chasseur se rendirent au bord du lac, guidé par l'animal qui continuait à aboyer en regardant les eaux; les parents appelèrent en vain leur fils; alors un vieillard à cheveux blancs sortit du lac, se dirigea vers eux, les réconforta et leur distribua plusieurs bâtons de bois; les parents emportèrent avec eux quelques-uns de ces bâtons et laissèrent les autres sur place; ils s'endormirent et, lorsqu'ils s'éveillèrent, ils s'aperçurent que les bâtons s'étaient métamorphosés en or; au petit matin, ils revinrent auprès du lac pour récupérer les autres bâtons, mais ceux-ci avaient disparus; le vieillard à cheveux blancs revint et leur dit qu'ils ne reverraient plus leur fils; il leur tendit un bol de bois et leur recommanda de le remplir d'eau, de jeter celle-ci au ciel, en cas de sécheresse, et qu'il se mettrait aussitôt à pleuvoir; les parents eurent bientôt l'occasion de mettre à l'épreuve les vertus du bol enchanté; celui-ci tint ses promesses et, depuis ce temps, la pluie ne fait jamais défaut aux villageois des environs. La Porte de l'Enfer était autrefois un étroit et sombre passage à travers les montagnes; il est désormais doublé par un tunnel. La Gorge Dahai abrite des plantes et des animaux semi-tropicaux; un village rustique d'une trentaine de maisons y offre l'occasion de s'initier à la vie rurale. La Montagne Cuifeng est un des endroits touristiques les plus renommés du Gansu; un monastère, perdu dans les pins et les cyprès, y fut construit à l'époque des Song, puis agrandi sous les Ming. La Grotte de la Bouche du Serpent, au nord du village de Jiuyan, au flanc des monts Baijian, mesure 8 m de diamètre; elle est si profonde que l'on n'en voit pas le fond. Le comté possède plusieurs anciennes cités: à Xigu, bâtie sous les Song, puis remaniée sous les Ming, on peut encore voir les restes d'un mur d'enceinte long de 21 m et haut de 7,6 m, qui témoigne de l'importance stratégique de ce poste entre la Chine et le Tibet, appelé par les Tibétains la "Porte des Mines d'Or"; à Guazan, la Cité du Lotus, datant des Han, les vestiges des murailles sont encore imposants, tant au nord (280 m) qu'au sud (156 m); Fengdie, édifiée également sous les Han, couvrait une superficie d'environ 43000 mètres carrés (264x163 m); Huayan ou Huayang, faussement appelée Huanian, datant aussi des Han, de forme triangulaire, mesure 450 m de l'est à l'ouest et 390 m du nord au sud; une autre ville ancienne se trouve dans la Gorge Dayu. Des vestiges de fortifications d'autrefois existent encore à Zhouqu (mur des Ming) et à Zuierping (forteresse des Han). De nombreuses reliques archéologiques ont été découvertes; elles se rapportent aux cultures Majiayao, Qijia, Siwa, Miaodigou, Yangshao*. De multiples tombeaux ont aussi étaient fouillés; ils vont de l'époque des Royaumes combattants jusqu'aux Ming, en passant par les Qin, les Han, les Tang et les Song; la plupart ont malheureusement été détruits; la sépulture la mieux conservée date de l'époque des Song et se trouve dans la gorge Shimen: c'est une tombe pour deux personnes, de forme carrée, surmontée d'une pyramide, dont les murs sont décorés. *Ces cultures sont représentées au musée de Lanzhou. Comme dans les autres comtés, plusieurs festivités se déroulent tout au long de l'année. Le Festival de Collecte des Fleurs de Boyu mérite une mention spéciale en raison de la légende qui lui a donné naissance. Boyu était autrefois extrêmement pauvre; une jeune fille d'une grande beauté et d'un coeur compatissant, nommée Lianzhi, arriva du sud et apprit aux infortunés habitants de l'endroit les arts de l'agriculture, du tissage, de la couture et de la broderie; elle cueillait des fleurs pour soigner les malades et montrait aux gens comment découvrir les racines sauvages comestibles et ramasser les fruits pour calmer leur faim; les femmes du village la considéraient toutes comme leur soeur; le 5ème jour du 5ème mois lunaire, elle fut emportée d'une montagne par une tornade; douze jeunes filles la cherchèrent pendant trois jours et trois nuits, à travers monts et ravins, avant de retrouver son corps; elles l'ensevelirent en pleurant, avec des fleurs et des branches de cyprès; depuis cette date, en mémoire de Lianzhi, la population locale, en costumes de fête, gravit chaque année la montagne, cueillant les fleurs sauvages, priant pour obtenir le bonheur et l'abondance, dansant et chantant; les habitants reviennent vers le village les bras chargés de fleurs et s'y réunissent, se congratulant, chantant et dansant, autour d'un feu de camp, jusqu'à la nuit. Les costumes folkloriques tibétains
du Zhouqu se regroupent en six styles distincts: ceux de Shanghe, ceux
de Nanshan, ceux de Baleng, ceux de Wuping, ceux de Gongba, ceux de Boyu;
bien qu'ils puissent paraître similaires pour des profanes, ils sont
tous différents et splendidement colorés.
Tsampa: breuvage composé de thé émulsionné avec du beurre de yak auquel on ajoute de la farine d'orge grillé et aussi parfois du sucre ou du fromage. C'est un met tibétain traditionnel qui ressemble davantage à une soupe qu'à une boisson. Yaourt: il se confectionne de la manière suivante: du lait bouilli est versé dans un récipient; on y ajoute un peu de yaourt de la veille avant qu'il ne refroidisse; le récipient est ensuite couvert et placé dans un endroit chaud pendant douze heures. Le yaourt, sucré ou non pour en atténuer l'aigreur, peut être pris comme apéritif ou comme repas; en offrir à ses invités est faire preuve de délicatesse. Riz Juema (ou Jiaoma): les ingrédients pour confectionner ce plat comprennent du riz, des polypodes*, du sucre et du beurre. Le riz et les polypodes sont cuits séparément. On les met ensuite, à parts égales, dans un bol et on les recouvre de sucre et de beurre. Riz et polypodes se mélangent pendant la consommation du plat. Ce plat sucré, riche mais non gras, est apprécié des Tibétains. C'est un symbole de réunion et on le sert aux invités. Les plantes utilisées se développent sous terre et fournissent des fruits replets et nutritifs; ramassés au printemps et en automne, ces fruits sont des cadeaux appréciés des amis et des parents. *J'ai traduit "fern brake" par polypode; il s'agit d'une fougère et c'est probablement le rhizome qui est employé dans cette préparation culinaire, plutôt que les frondes ou la crosse; le rhizome servait autrefois en France à aromatiser les nougats; séché, il est utilisé en pharmacie, depuis très longtemps, comme vermifuge, cholagogue, laxatif et expectorant. Les fruits doivent être les spores qui se forment sur les frondes constituant le feuillage de la plante. Viande bouillie: les bouchers* tibétains étranglent les animaux, au lieu de les égorger; le sang reste dans le corps, ce qui en assure la qualité, ainsi que la fraîcheur de la viande. Celle-ci est cuite avec les os dans de l'eau claire plutôt que d'être rôtie. Comme condiments, on utilise le sel et des épices relevés**. La viande bouillie est un met très populaire parmi les Tibétains. *Tuer est strictement interdit par le bouddhisme; les croyants ne devraient manger que de la chair d'animaux morts naturellement. L'existence de bouchers bouddhistes est donc problématique et cette profession mal famée devrait être réservée aux mécréants. **Prickly-ash: piment, poivre moulu au tout autre épice piquant. Saucisses: on trouve deux sortes de saucisses au Gannan: les saucisses à la viande et les saucisses au sang. Les saucisses à la viande sont confectionnées en remplissant les intestins avec une mixture, de poumon, de coeur... et autres abats de mouton émincés, la dite mixture étant assaisonnée de pousses d'ail et de sel. Les saucisses au sang sont fabriquées en remplissant les intestins d'un mélange de hachis de mouton imprégné de sang, assaisonné de sel et de piment ou poivre moulu (prickly-ash). Les saucisses bouillies sont délicieuses et aussi très nourrissantes. Petit pain farci tibétain*: la farce est principalement constituée de boeuf émincé ou de mouton; elle est assaisonnée de sel, d'oignon vert chinois, d'huile végétale, d'épices forts (prickly-ash) et de sauce de viande. Cette farce est enveloppée dans une pâte non levée à laquelle on confère la forme d'une tirelire ou d'une fleur de lotus. Le petit pain obtenu est fourré d'une viande juteuse au goût excellent et à la couleur appétissante. *Je pense qu'il s'agit des fameux "momos". Daoshihe: daoshihe signifie "cuit sur la pierre chaude" en tibétain. C'est une méthode de cuisson d'extérieur typiquement tibétaine. Des pierres convenablement choisies sont ramassées et soigneusement lavées; ensuite, elles sont placées dans un feu et chauffées au rouge. Du mouton désossé et coupé en minces tranches est salé et épicé; une panse de brebis bien nettoyée est remplie avec la viande et les pierres brûlantes bien tassées; la panse est ensuite cousue aussi hermétiquement que possible. Au fur et à mesure que la chaleur monte à l'intérieur de la panse, elle gonfle comme un ballon; si nécessaire, un peu de vapeur est libérée pendant la cuisson. Ensuite, la panse est roulée avec précaution dans l'herbe fraîche. Quand la température a suffisamment baissé à l'intérieur de la panse, on perce une petit trou pour en expulser le jus; puis on ouvre la poche en deux. Le plat est alors prêt à être dégusté. On mange un morceau de viande et on boit une gorgée de jus pour l'accompagner; le souvenir de ce met est impérissable! Thé au lait: verser de l'eau froide dans une casserole et y ajouter des briques de thé; mettre à bouillir jusqu'à ce que la couleur de l'eau devienne brun foncé. Rajouter du lait frais et des feuilles de thé avant de servir. On peut améliorer la saveur de ce breuvage en le salant ou en lui adjoignant du gingembre, des noix ou d'autres édulcorants. Quelques tasses de ce thé suffisent à rassasier et à calmer la soif de n'importe quel glouton pour la matinée. Vin d'orge:
pour fabriquer du vin d'orge, les Tibétains commencent par laver
les grains puis les font bouillir. Ensuite l'eau de cuisson est mise à
décanter. Après refroidissement, une levure appropriée
est rajoutée aux grains retirés de l'eau; des sacs sont ensuite
remplis de ces grains agrémentés de levure. Les sacs sont
placés dans un endroit chaud pour accélérer la fermentation.
Deux ou trois jours plus tard, l'orge fermenté est mis dans des
urnes; de la levure est rajoutée et les urnes sont fermées
soigneusement pour éviter la fuite du gaz. L'orge est distillé
deux semaines plus tard. Pour ce faire, le produit de la fermentation est
placé dans un récipient métallique; on y rajoute de
l'eau claire; le récipient, recouvert par un bouchon de bois, est
relié à une urne de distillation, via un tuyau qui passe
par un trou percé au centre du bouchon; un feu, sous le récipient
métallique, amène l'orge et l'eau à ébullition;
la vapeur emprunte le tuyau pour parvenir à l'urne; cette dernière
est rafraîchie avec de l'eau froide ou de la glace; le vin coule
par de petits trous aménagés à la base de l'urne.
Le vin d'orge, peu chargé en alcool, a un goût agréable,
il est nourrissant et soigne, paraît-il, certaines maladies. Les
paysans tibétains fabriquent eux-mêmes leur vin d'orge et
aucune fête ne se déroule sans cette boisson. Offrir du vin
d'orge, avec une écharpe de bienvenue (khata), est une marque
d'hospitalité et d'amitié.
Les maisons tibétaines sont construites en bois et en adobe; leur toit est plat; l'entrée monumentale est décorée; à l'intérieur, la cuisine et le séjour ne font généralement qu'un; une niche pour le bouddha est aménagée dans l'un des murs; l'alcôve peut contenir un lit de briques, le kang, sous lequel on allume du feu pendant l'hiver; on retrouve le même dispositif chez les Hui (voir aussi Tucci ). Les nomades vivent traditionnellement sous
la tente.
Il existe trois sortes de tentes. La tente noire est tissée artisanalement
en poil de yak; elle est bien adaptée aux rudes conditions climatiques
de l'automne et de l'hiver sur les hauts plateaux. La tente blanche est
en coton décoré de motifs noirs ou bleus; elle est très
élégante, relativement légère et facile à
démonter; elle convient aux campements d'été. Une
tente mixte, coton et poil de yak, existe également; le milieu est
alors en poil de yak et les bords en coton. Les tentes sont spacieuses
et constituent de véritables habitations; les coins sont fermement
retenus au sol par de solides cordes; deux poteaux soutiennent le toit;
les aliments et les bagages sont placés au fond de la tente; un
fourneau et un autel bouddhiste occupent le centre; l'intérieur
est séparé en deux parties, celle des hommes à gauche
et celle des femmes à droite.
Cette page a été rédigée à partir de l'ouvrage: "A Dream World - Shambala, Gannan", Editor in Chief - Gongbao Nanjie - Lanzhou University Press. |